Reportage

Ganvié, la Venise africaine

Au sud du Bénin, entre Nigéria et Togo, la cité lacustre poursuit son mode de vie séculaire, hors du temps, héritage de ses premiers habitants arrivés au XVIIIe siècle. Balade sur le lac Nokoué, dans l’un des sites les plus pittoresques et insolites d’Afrique.

Reportage et photos Patrick Cros



L’arrivée par la route au débarcadère d’Abomey-Calavi, ne laisse pas encore deviner le spectacle qui attend les visiteurs. Tout juste si elle le suggère avec cette foule insolite, semblant venir de nulle part au bord de l’étendue d’eau.
Pêcheurs et acheteurs se mélangent dès les premiers rayons de soleil sur un marché semi-flottant animé où s’étalent bidons en tout genre, fruits, légumes et autres denrées.
Il ne s’agit pourtant que d’une étape avant d’atteindre Ganvié, cette cité lacustre mythique surnommée la Venise de l’Afrique, dont l’origine remonterait au XVIIIe siècle où elle aurait été créée pour se protéger des razzias esclavagistes.

Pêcheurs de père en fils

Conduite par un passeur, la pirogue en bois glisse sur l’eau pour une destination surprenante, bercée par le clapotis de l’eau et le ronronnement du moteur. Il faut quitter la partie marécageuse du lac pour gagner les eaux libres. Un parcours d’une dizaine de kilomètres où se croisent des embarcations légères, à voile, à rame ou à moteur, chargées de denrées ou de canaris qui assurent l’approvisionnement en eau douce potable depuis le rivage. Bientôt apparaissent les akadja, parcelles de pêche délimitées par des branchages plantés dans l’eau. Une sorte de pièges géants dont la décomposition attire les poissons qui viennent se nourrir et se reproduire. Les pêcheurs y jettent leurs filets ou y posent des nasses. L’amour de la pêche se transmet ici de père en fils, depuis des générations.

Un monde hors du temps

Les milliers d’habitations sur pilotis de Ganvié apparaissent, souvent délabrées, posées sur une eau paisible, préservées de l’agitation du monde moderne. Cotonou, la capitale économique et ses 800 000 habitants, n’est pourtant qu’à une vingtaine de kilomètres au sud, sur une large bande de terre qui protège le lac des assauts de l’océan Atlantique. La plus grande cité lacustre d’Afrique avec ses 30 000 habitants, des Toffinu, perpétue son mode de vie traditionnel sur l’eau, basé sur la pêche et l’élevage de poisson, avec la pirogue comme unique moyen de locomotion.
Les premières cases se précisent, entre bleu du ciel et bleu gris du lac, construites en feuilles de palme et en bambou, juchées sur des pilotis en teck et protégées par un toit de chaume, abri « efficace » contre le soleil, la chaleur et la pluie. Certaines sont dotées d’un balcon et d’autres sont peintes de motifs géométriques multicolores.

Un marché flottant

Un espace dégagé, véritable place aquatique, abrite un marché flottant. Les femmes, vêtues du boubou traditionnel et coiffées d’un large chapeau de paille, proposent de leurs embarcations des fruits et légumes, des condiments, du lait ou encore du pain. C’est un marché gai et coloré, pittoresque et animé malgré la pauvreté, où la négociation est de mise. Les tractations se font de pirogue en pirogue et dans la bonne humeur, égayées par de grands éclats de voix et de rires. Une animation qui contraste avec le charme silencieux des rues sillonnées non pas de gondoles, mais par de gracieuses pirogues ou de lourdes barques chargées à ras bord. Peuple affable, souriant et hospitalier à l'égard des visiteurs étrangers, mais trop souvent photographié, il montre parfois un certain agacement devant l'objectif parfois insistant de certains touristes.

La rue des amoureux

Quelques coups de rames plus loin, la « rue des amoureux » évoque la poésie romantique des cités lacustres. Les jeunes locaux se retrouvent le soir dans ce « Grand canal » bordé de maisons pittoresques. La nature reprend ses droits avec les derniers vols d’oiseaux, les ultimes reflets du soleil sur l’eau, le souffle léger du vent sur un lac qui emporte l’esprit vers des contrées imaginaires. A la nuit tombée, des milliers de lampes à pétroles illuminent les maisons, éclairant les canaux dans une atmosphère étrange. Une nuit s’impose alors dans l’auberge sur pilotis « Chez M », propriété de Tanti M, chaleureuse mama qui offre des chambres au confort surprenant, avec douche et toilettes, équipées de moustiquaires ! Pour s’endormir, il suffit de se laisser bercer par les rumeurs de la nuit africaine, avec la sensation de vivre dans un autre monde, dans une autre vie.
PC.






Y aller

Air France relie Paris à Cotonou (Bénin)
L’aéroport international se trouve à 20 km du débarcadère d’Abomey-Calavi,
porte d’entrée du lac Nokoué et de Ganvié.

http://www.airfrance.com



23/09/2011
Patrick Cros




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