Gastronomie

La brasserie Excelsior à Nancy… pour le plaisir des yeux et du palais !

À mi-chemin entre la gare et la célèbre Place Stanislas, la brasserie Excelsior (désignée couramment par apocope « Excel » ou « Flo ») est un site incontournable de par la gastronomie lorraine proposée, et de par son architecture exceptionnelle de style Art Nouveau. Aperçu de cet établissement considéré comme l’une des plus belles brasseries de France.

Par Bertrand Munier



Nancy en Lorraine et son illustre place Stanislas qui mène à la notoire brasserie Excelsior.© Bertrand Munier

Louis Moreau comme chef de cordée

À l’Excelsior, le service est assuré dans la pure tradition des brasseries parisiennes..© Bertrand Munier
Voulue en 1911 par Louis Moreau, brasseur à Vézelise dans le pays du Saintois en Meurthe-et-Moselle, la brasserie Excelsior est l’œuvre des architectes Lucien Weissenburger et Alexandre Mienville, couronnée par des verrières réalisées par Jacques Gruber, des lustres signés Daum, des boiseries réalisées par Louis Majorelle, des sculptures exécutées par Jean-Louis Burtin, Jules Boiteux (artistes issus de la prestigieuse École de Nancy), puis par une descente d’escaliers imaginée par Jean Prouvé.

Pour comprendre cet engouement à ériger à Nancy intra-muros une telle brasserie dans les us et coutumes des cafés de la Belle-Époque, il faut s’arrêter quelques instants sur cette période phare du luxe et de la fête.

Le Traité de Francfort (1871), entraînant la tragique perte de départements français au profit du pouvoir germanique (Bas-Rhin, Haut-Rhin, Moselle), fut par ricochet une aubaine pour la ville de Nancy. Très peu éloignée de la nouvelle frontière franco-allemande, elle devint le refuge de nombreux artistes. Certains d’entre eux optèrent pour la nationalité française, apportant de facto leurs capitaux et leur savoir-faire. Il en fut de même lors du transfert de la faculté de médecine de Strasbourg à Nancy (1872) qui entraîna la venue de professeurs émérites et l’édification d’hôpitaux civils conséquents. À cette période, la population locale doubla puis par extension, les immeubles et commerces se multiplièrent ici et là, avec une propension pour l’ostentatoire et l’aisance

Les artistes de l’École de Nancy s’invitent au festin

De gauche à droite un intérieur signé par des maîtres de l’École de Nancy avec en souvenir l’image de la brasserie Moreau..© Bertrand Munier
Dans cette même veine de création, l’École de Nancy ou Alliance Provinciale des Industries d’Art fut le fer de lance de l’Art Nouveau en France. Le 11 février 1901, l’École de Nancy composée d’artistes illustres était portée sur les fonts baptismaux.

Le bureau du comité se composa d’Émile Gallé, président, Louis Majorelle, Antonin Daum et Eugène Vallin, vice-présidents. En outre, ce comité directeur fut constitué également de trente-six membres. La première exposition de l’École de Nancy se tint à Paris (1903) au Pavillon de Marsan à l’invitation de l’Union Centrale des Arts décoratifs. Cependant, la mort d’Émile Gallé (1904) va terriblement frapper cette école. Malgré l’immense talent de son nouveau président Victor Prouvé, cette école perdit son leader incontestable. Les statuts furent changés et le comité se réduisit à quelques membres. Il fallut quasiment attendre un siècle, pour qu’en 1999, à l’initiative de la ville de Nancy, d’importantes manifestations se déroulent afin de redécouvrir cette étonnante et prestigieuse saga artistique.
 
Dans ce tourbillon d’événements d’avant la Grande Guerre, la bière coulait à flot en Lorraine. Les unités brassicoles fourmillaient d’ingéniosité pour vanter leurs produits et depuis le passage du savant Louis Pasteur à la brasserie Tourtel à Tantonville (54), la bière pouvait s’exporter aux quatre coins du monde tout comme au sein des colonies françaises d’outre-mer grâce à la pasteurisation. C’est ainsi que Louis Moreau, issu d’une grande lignée brassicole, s’ingénia à ouvrir la brasserie Excelsior à Nancy pour un coût de 184000 francs or amortis en huit ans. Au final, le jour béni de l’inauguration intervint le dimanche 26 février 1911… pour ne plus fermer ses portes et connaître une aura grandissante non usurpée dans les lacis de la gastronomie lorraine.
 

Gloire et méga-folie d’un premier magistrat

L’Excelsior s’élève au cœur de Nancy..© Bertrand Munier
Miraculeusement, l’Excelsior échappa aux bombardements des deux conflits mondiaux, alors que la glorieuse Maison Corbin (située à quelques mètres) était la proie des flammes.

Dès lors, personne n’aurait imaginé l’acmé de ce fleuron artistique. Pourtant, l’arrivée d’un nouveau maire aux rênes de l’organigramme municipal nancéien déclencha un violent courroux des habitants. « Une totale hétérodoxie » clamèrent ceux-ci à l’unisson. Cet édile (docteur en droit et sénateur) avait décidé « d’américaniser » Nancy et le secteur de la gare puis de la Place Thiers, en appliquant la pratique de « la terre brûlée ». De magnifiques bâtisses et commerces anciens furent voués aux coups des pioches des démolisseurs pour voir s’élever dans le ciel local un pseudo gratte-ciel dénommé « Tour Thiers ». De semblables immeubles devaient également voir le jour au détriment du patrimoine local promis à une destruction imminente. Gloire et pouvoir au préjudice de l’esthétisme patrimonial. Heureusement, ce maire fut congédié à l’issu de son seul mandat municipal face à la pression inéluctable des urnes. Malgré tout, le mal patent était fait dans ce quartier ultra-chic !
 
Finalement pour préserver ce haut-lieu gastronomique et architectural, les façades, toitures et la salle de brasserie avec son décor du rez-de-chaussée furent classées Monument historiques en date du 22 juin 1976. Onze ans plus tard (1987), le groupe Flo redynamisa l’ensemble en acquérant l’établissement pour lui donner une cure de jouvence.
 

Le chef vosgien Jacques Hildenbrand au piano

Jacques Hildenbrand le talentueux chef de cuisine..© DR
Au sein de ces murs légendaires Jacques Hildenbrand (natif d’Étival-Clairefontaine dans les Hautes-Vosges) devint le talentueux chef d’orchestre d’une importante brigade, qui propose quotidiennement une cuisine authentique et subtile.

Cet ancien élève du lycée hôtelier de Gérardmer (88), qui a un vécu professionnel à Pékin, va par son talent et sa créativité, offrir un panel culinaire extraordinaire… à l’instar du savoureux dessert le Tout-Nancy, un parfait glacé aux éclats de macaron et bergamote rehaussé d’un coulis et eau-de-vie de mirabelles.
 

À savourer sans modération…. .© Bertrand Munier
Ceci n’est qu’un embryon d’une carte séduisante avec en exergue les incomparables plateaux de fruits de mer préparés avec soin par le maître-écailler Amar Bouzraib.

Côté assiette, comment ne pas se délecter également du traditionnel foie gras au chutney de mirabelles, des œufs mollets aux girolles, émulsion et tuile au parmesan, du tartare de bœuf Charolais, du saumon poché au beurre blanc, du foie de veau poêlé aux framboises, de la succulente choucroute de poisson ou des crêpes Suzette flambées devant les clients ?  Oui ! Le plaisir des yeux et du palais est bien à la brasserie nancéienne l’Excelsior… et ce n’est pas faire preuve de flagornerie outrancière de le souligner avec objectivité.
 

La gent féminine est très présente dans le service en salle mais également en cuisine. .© Bertrand Munier
En habit traditionnel de garçon de café, le personnel slalome avec dextérité dans ce temple du bien-être avec un sens de l’équilibre hors norme et des bras d’acier pour porter à hauteur de visage les plateaux aux clients… qui se délectent de ce ballet intriguant et fascinant.

Une chorégraphie répétée sans cesse tous les jours de l’année avec le sourire et l’amabilité de circonstance. Ces employés sont placés sous la direction d’Éric Gérard qui veille au bon fonctionnement de l’établissement ainsi qu’à l’accueil des centaines de convives se pressant quotidiennement à la table du festin. « Effectivement, nous sommes ouverts tous les jours et bien sûr dimanches et jours fériés, rapporte le directeur. La carte des menus est réactualisée en fonction des saisons. En outre, elle est composée de produits frais transformés sur place. Tout ceci avec un service stylé. Dans ce programme, il ne faut pas omettre de rappeler qu’un petit-déjeuner à la carte est possible dès l’ouverture ainsi qu’une multitude de desserts tout au long de l’après-midi. Qui plus est, nos spacieux et chaleureux salons privatifs (Majorelle, Gambetta et du Caveau) s’adaptent aux réunions d’affaires et à tous les types de repas professionnels ou familiaux. »

Éric Gérard l’affable directeur de la brasserie. Georges Mercier, le second de Jacques Hildenbrand. .© Bertrand Munier
Au final, franchir le seuil de l’Excelsior, c’est pénétrer dans une brasserie millésime 1900 hors du temps ou la cuisine transporte les clients dans un univers d’effluves enivrants, accompagné d’un service tout aussi convivial qu’efficace… avec un chef qui a su épouser modes et saisons sur une carte riche et variée.
 

Plus d'infos

Le maître-écailler Amar Bouzraib œuvre avec sourire et dextérité à l’entrée de la brasserie..© Bertrand Munier
« Brasserie Excelsior Nancy »
50 rue Henri Poincaré (face à la gare)
54 000 Nancy
Tél : +33 (0)3 83 35 24 57



Lorraine - Meurthe-et-Moselle


Ouvert 7 jours sur 7

du mardi au samedi de 08H00 à 00H30
le dimanche et le lundi de 08H00 à 23H00

 



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Office de tourisme
 

L'entrée de la Brasserie l'Excelsior à Nancy .© DR


24/07/2015
Bertrand Munier




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