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Reportage

Sur les pas de Jaurès.... dans le Tarn

Innombrables sont les rues, les places, les établissements scolaires qui portent son nom mais que sait-on vraiment de Jaurès, ce militant de la République et de la paix qui mourut assassiné à la veille de la Première guerre mondiale ? Son centenaire est l’occasion de lui rendre hommage dans le Tarn où il naquit et mena ses premiers combats.

Par Catherine Gary



Castres : Maisons sur l'Agout (Crédit photo CDT du Tarn)
Castres : Maisons sur l'Agout (Crédit photo CDT du Tarn)


L’enfance d’un socialiste du siècle.

Jaurès passe son enfance à Castres. La ville, reconnaissante, lui a érigé une statue sur la place qui porte son nom, à proximité de l’Argout.  Elle lui consacre aussi un musée. (Crédit photo Catherine Gary)
Jaurès passe son enfance à Castres. La ville, reconnaissante, lui a érigé une statue sur la place qui porte son nom, à proximité de l’Argout. Elle lui consacre aussi un musée. (Crédit photo Catherine Gary)
Jean Jaurès naît  en 1859 à Castres au sein d’une famille modeste dont il gardera toute sa vie le souvenir d’une enfance heureuse.

A la ferme de la Fédial, domaine de ses parents, il aide tout jeune aux travaux des champs, participe aux vendanges et prend conscience des difficultés vécues au jour le jour par les ouvriers agricoles. Elève brillant, il décroche vite les premiers prix et se distingue à 17 ans par un fameux discours au préfet en visite dans l’établissement : l’adolescent sait déjà manier les mots, parler à son auditoire, un avenir brillant l’attend loin de sa ville natale.  Confirmation à Paris lors du concours d’entrée à Normale Sup où il est reçu premier. Une agrégation de philo plus loin et le voilà au lycée d’Albi, de retour sur ses terres mais pour peu de temps : cet enseignant brillant voit plus loin que l’espace de la classe. Son intérêt pour la vie publique, ses talents de tribun le poussent à envisager une implication dans la vie politique de sa région. Il se présente aux élections législatives 1885 et, à 26 ans, est élu député du Tarn. A partir de ce moment, son destin est tout tracé, il ne reviendra pas en arrière. Fi de l’enseignement - ce qui ne l’empêchera pas de participer à l’élaboration de la loi de 1905 sur la séparation de l’Eglise et de l’Etat - il s’attelle maintenant à la vie publique, multipliant les engagements en faveur des défavorisés qu’ils soient paysans ou ouvriers. Ecrivain, journaliste fondateur en 1904 du journal L’Humanité, philosophe, historien, Jaurès participe désormais aux grands débats du temps. D’abord républicain puis socialiste, il intervient sur toutes les questions sociales, celles des ouvriers en particulier.

Castres, les premiers pas d’un militant humaniste

De gauche à droite : Maison natale de Jaurès; La plaque commémorative apposée au-dessus de la porte; Musée Jean-Jaurès à Castres (Crédit photo CC By-SA 3.0 Roudière)
De gauche à droite : Maison natale de Jaurès; La plaque commémorative apposée au-dessus de la porte; Musée Jean-Jaurès à Castres (Crédit photo CC By-SA 3.0 Roudière)
A Castres tout commence. Au 5 rue Sœur Richard exactement où une plaque commémorative sur le mur d’une maison discrète signale la naissance d’un certain Jean Jaurès, non loin du collège qui l’accueille ensuite comme élève.

On en profite pour partir en balade le long des quais de l’Agout où s’alignent les façades colorées des anciennes maisons de tisserands, des tanneurs et des teinturiers, ces emblèmes de la ville où se travaillait le cuir, la laine et le papier quand la ville était prospère. Sur la place piétonne plantée de magnolias et ornée de fontaines, la belle statue en marbre immaculé de Jaurès qu’a sculptée Gabriel Pech trône en majesté depuis 1925 en hommage au grand orateur. Rue Pélisson, le Musée/Centre national Jean Jaurès est un incontournable pour le riche fonds documentaire et iconographique retraçant l’itinéraire du héros de la ville depuis sa petite enfance jusqu’à ses derniers jours. On s’attarde avec intérêt devant les nombreux panneaux et les vitrines illustrant la brillante évolution de cet humaniste dont l’époque revit aussi le temps de quelques films et d’une exposition jusqu’au 28 septembre sur l’Affiche en guerre.

Carmaux, le premier grand combat

Jaurès mène ses premiers combats à Carmaux. La verrerie Sainte Clotilde est devenue un Musée de l’histoire verrière ainsi qu’un Centre de création. La VOA, usine de fabrication de bouteilles, se visite à Albi. (Crédit photos Catherine Gary)
Jaurès mène ses premiers combats à Carmaux. La verrerie Sainte Clotilde est devenue un Musée de l’histoire verrière ainsi qu’un Centre de création. La VOA, usine de fabrication de bouteilles, se visite à Albi. (Crédit photos Catherine Gary)
Si Castres a vu naître Jaurès, c’est à une quarantaine de kilomètres de là, à Carmaux, que son nom reste attaché. La ville compte alors plus de 1800 mineurs et 559 verriers, la fabrication des bouteilles ayant besoin de fusion haute température.

Les conditions de travail ici sont dures à tel point que la situation s’aggrave après l’échec des revendications syndicales auprès des patrons de la Société des mines et de la verrerie de Sainte-Clotilde. Le fondateur du syndicat des mineurs est licencié en 1892, un militant syndicaliste de la verrerie renvoyé en 1895 : des grèves importantes éclatent et malgré le soutien apporté par Jaurès aux ouvriers, l’usine continue son  activité en employant des ouvriers recrutés dans toute la France. Les grévistes de la verrerie décident alors, avec l’appui de Jaurès et l’aide financière de donateurs, de créer une nouvelle verrerie entièrement autogérée à Albi . A partir de cette époque, Jaurès, définitivement socialiste, lutte ouvertement  contre l’exploitation du travail d’autrui et la création d’une société plus fraternelle à travers maintes propositions de lois comme la baisse du temps de travail, l’augmentation des salaires, la retraite des vieux travailleurs, la sécurité sociale... Aujourd’hui, c’est donc la VOA d’Albi qui continue, depuis cette grève, la fabrication de bouteilles en verre pour Pernod Ricard, Nestlé, Orangina et bien d’autres marques. Le visiteur assiste aux différentes étapes à partir des deux grands fours qui travaillent jour en nuit en flux tendu. L’ancienne Verrerie royale de Solages à Carmaux est devenue, elle, un  Musée/Centre d’art du verre et mérite la visite pour la mémoire qu’elle garde du travail des verriers de l’époque et des luttes qu’ils durent mener. C’est aussi un Centre de création verrière contemporaine dont les expositions temporaires à thèmes sont d’une qualité reconnue.

Cagnac-les-Mines, mémoire de l’exploitation charbonnière locale

Le Musée de la mine de Cagnac-les-Mines propose une immersion à 300 mètres sous terre pour se faire une idée de la vie des mineurs à l’époque de Jaurès (Crédit Photo Catherine Gary, C.Rivière,Laurent Frezoul,Donatien Rousseau).
Le Musée de la mine de Cagnac-les-Mines propose une immersion à 300 mètres sous terre pour se faire une idée de la vie des mineurs à l’époque de Jaurès (Crédit Photo Catherine Gary, C.Rivière,Laurent Frezoul,Donatien Rousseau).
Sept siècles d’histoire du charbon défilent au cours de cette visite dans les profondeurs de la mine, dernier témoignage du travail harassant de ces hommes courageux qui bravaient le danger des éboulements et des coups de grisou.

Trois puits fonctionnaient encore en 1979 avant leur fermeture définitive mais seul le P 2, classé aujourd’hui Monument historique, est ouvert à la visite grâce aux restaurations effectuées durant plusieurs années par six mineurs bénévoles et fiers de leur ancien métier. Après avoir passé la lampisterie et la salle des machines, on descend en monte-charge dans les profondeurs qu’éclairaient à l’époque bougies puis lampes frontales. Avant que les chevaux ne poussent les wagons, le travail était effectué par des enfants, les petits “galibots“, et plusieurs corps de métiers, du boiseur au contremaître, s’activaient dans la pénombre, peinant à la tâche : chaque jour il fallait remonter plus de quatre tonnes de charbon à la lumière du jour… C’est en 1892, lors de cette grande grève des mineurs que Jaurès fit entendre sa voix de tribun pour défendre leur cause. Il ne cessera plus ensuite de défendre les classes sociales opprimées et de lutter pour la paix, sans pouvoir l’éviter. Il meurt trois jours avant la déclaration de guerre, le 31 juillet 1914.




Plus d'infos

Exposition au Musée Jean-Jaurès de Castres (Crédit photo DR)
Exposition au Musée Jean-Jaurès de Castres (Crédit photo DR)
Sur les pas de Jaurès :

- A Castres :
Collège Jean Jaurès : 
Jaurès, l’homme de la paix. Jusqu’au 28 mai.
Contact : 05 63 71 54 00q
Musée Jean Jaurès  : la vie et le parcours de ce grand tribun.
Contact : 05 63 62 41 83
-   A Carmaux :
Musée/Centre d’art du verre :
Carmaux sous le regard de Jaurès. Jusqu’au 18 juin
 Ilots d’utopies, un esprit Jaurès : créateurs contemporains
Contact : 05 63 80 52 90
- A Albi :
Archives départementales du Tarn : Jaurès, le parcours. Jusqu’au 24 septembre
Contact : 05 63 45 64 40
www.museeverre-tarn.com/
Contact : 05 63 78 10 10
- A Cagnac-les-Mines :
Musée de la mine..
Visite et exposition Jaurès et les mineurs. Jusqu’au 4 décembre.
Contact : 05 67 89 62 02
- A Pampelonne :
Ouverture de l’Espace Jaurès
Contact : 05 63 76 32 09


Informations:
www.tourisme-tarn.com
 


Le charme d'un vieux qartier d'Albi avec ses maisons anciennes (Crédit photo Catherine Gary)
Le charme d'un vieux qartier d'Albi avec ses maisons anciennes (Crédit photo Catherine Gary)
Ou dormir :
Castres : Le Grand hôtel
En centre ville avec vue sur l’Agout, bel hôtel design récemment rénové.
Chambres à 97 euros.
www.grandhoteldecastres.com
 
Ou bien manger :
 Albi : Le Lautrec
Dans la vieille ville, au pied de la belle maison de la famille Lautrec.
Repas en terrasse pour déguster une excellente cuisine locale. 2 plats à partir de 16 euros.
www.restaurant-le-lautrec.com
Castres : Le Saveurs 
cuisine inventive récompensée par une étoile au Michelin. 
Menu Saveurs : 28 euros.
www.bistrot-saveurs.com
 
 
 

Albi :  Au loin la Cité Episcopale avec en surplomb la cathédrale (crédit photo O.T. du Tarn)
Albi : Au loin la Cité Episcopale avec en surplomb la cathédrale (crédit photo O.T. du Tarn)


24/05/2014
Catherine Gary





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